15/01/15 - [DPEA] Séminaire transversal - L’implication des habitants dans les projets d’aménagement

Thème F : ACTEURS ET METIERS DU PROJET

Coordination : Isabelle Grudet.

Interventions de Camille Gardess et de Federica Gatta.

Camille Gardesse est sociologue et urbaniste, maître de conférences à l’Institut d’Urbanisme de Paris. Elle a tout d’abord étudié la sociologie des migrations et des relations interethniques en situations urbaines (principalement à l’URMIS – CNRS – Université Paris 7) ainsi que l’histoire des faits migratoires et des politiques de gestion de l’immigration en France (Cité Nationale de l’Histoire de l’Immigration). Elle a ensuite travaillé au cours de sa thèse (réalisée au Lab’Urba), mais aussi dans des recherches collectives (programme Concertation Décision Environnement sur la participation des habitants dans les projets d’écoquartiers) sur l’implication des habitants dans les projets d’urbanisme, en s’intéressant aux conditions d’articulation entre processus de projet urbain et démarche participative. Dans le cadre d’un post-doctorat mené au sein du Latts et de l’Université d’Amsterdam, elle a étudié les modalités de gouvernance à l’œuvre dans des projets de développement territorial en Ile-de-France et en Europe. Elle s’intéresse également aux conditions et aux inégalités d’accès des populations concernées par les politiques et projets urbains dans les dispositifs participatifs.

Federica Gatta est architecte, docteur en aménagement de l’espace et urbanisme, chercheur membre du LAA, enseignante vacataire à l’Ensaplv et à l’Ensav. Ses domaines de recherche sont l’anthropologie urbaine, l’épistémologie de l’urbanisme et la sociologie des mouvements sociaux urbains. Elle s’intéresse à la compréhension des dispositifs d’intégration des contestations urbaines dans les projets de transformation de la ville et à la critique et production des outils d’analyse qualitative capables de reformuler les relations entre citadins et projet.

La « concertation » pour le projet de réaménagement du quartier des Halles de Paris (2002 – 2010) : enjeux et limites de l’intégration des dispositifs participatifs dans une démarche de projet urbain.

L’intervention de Camille Gardesse s’appuie sur un travail de thèse qui a porté sur les modalités d’implication des habitants dans un projet urbain complexe, celui du réaménagement du quartier des Halles à Paris, entre 2002 et 2010. S’inscrivant dans la lignée d’un ensemble de travaux qui se sont intéressés en France à la démocratisation de l’action publique, cette recherche s’est intéressée aux conditions d’articulation entre processus de projet urbain et démarche participative, ainsi qu’à la portée des dispositifs expérimentés sur les décisions d’aménagement.

Au cours de cette intervention seront présentés les dispositifs participatifs déployés selon les différentes temporalités et objets du projet. La recherche permet d’apporter des éléments d’explication des raisons pour lesquelles le niveau consultatif a rarement été dépassé au cours de l’élaboration de ce projet, malgré les ambitions affichées par la municipalité. Les obstacles à la démocratisation de l’action publique en urbanisme trouvent leurs sources dans la prégnance chez les acteurs politiques et techniques, dans l’appréhension de leurs rôles et de leurs relations aux citoyens, d’un modèle de double délégation des pouvoirs, dont les spécificités dans le champ de la production de l’espace sont identifiées et discutées. Cette posture opère dans la manière d’organiser l’ingénierie du projet – en dissociant notamment celle-ci des démarches participatives engagées. Le projet de réaménagement du quartier des Halles a néanmoins donné lieu à des processus d’apprentissage pour les différents acteurs impliqués, y compris pour la ville qui a cherché à en tirer des enseignements pour d’autres opérations mais aussi plus largement par rapport au fonctionnement de ses services

Quelle place pour la critique aux formes d’implication des habitants dans les projets d’aménagement et aux dispositifs qui les encadrent ?

Dans le contexte de la construction de l’identité des métropoles européennes face à la récente crise économique, les associations et mouvements impliqués dans la transformation de la ville semblent prendre une place de plus en plus importante non seulement pour leur contribution à la construction du débat publique, mais aussi pour le rôle qu’elles jouent dans la mise en place des politiques urbaines.

L’intervention de Federica Gatta visera à explorer, à travers une analyse anthropologique, la dimension critique des actions de participation des citadins aux projets d’aménagement et d’autogestion d’espaces en attente de requalification. Cette analyse sera fondée sur l’exemple du Nord-Est parisien en tant que contexte qui permet l’observation de réseaux d’action des mouvements et de leur intégration dans les politiques. Il s’agira d’enquêter quelles relations s’instaurent entre associations et institutions et quels résultats ces relations provoquent en termes d’imaginaires, de processus de subjectivation et de temporalités dans la définition des projets urbains. Face à un débat scientifique qui semble partagé entre un plein consensus et un complet scepticisme envers « l’implication des habitants », il semble nécessaire proposer un décentrement du regard qui puisse interroger à la fois les nouvelles formes de contestation politique et les outils desquels se dote l’urbanisme pour intégrer ces contestations.

Voir les références bibliographiques de chacun des intervenants sur le site du DPEA.